"Est-il, en effet, une satisfaction plus vraie, un plaisir plus réel
que celui du navigateur qui pointe ses découvertes sur la carte
du bord ? Il voit les terres se former peu à peu sous ses regards, île
par île, promontoire par promontoire, et, pour ainsi dire, émerger
du sein des flots ! D'abord, les lignes terminales sont vagues, brisées,
interrompues ! Ici un cap solitaire, là une baie isolée,
plus loin un golfe perdu dans l'espace. Puis les découvertes se
complètent, les lignes se rejoignent, le pointillé des cartes
fait place au trait ; les baies échancrent des côtes déterminées,
les caps s'appuient sur des rivages certains ; enfin le nouveau continent,
avec ses lacs, ses rivières et ses fleuves, ses montagnes, ses
vallées et ses plaines, ses villages, ses villes et ses capitales,
se déploie sur le globe dans toute sa splendeur magnifique ! Ah
! Mes amis, un découvreur de terres est un véritable inventeur
! Il en a les émotions et les surprises ! Mais maintenant cette
mine est à peu près épuisée ! On a tout vu,
tout reconnu, tout inventé en fait de continents ou de nouveaux
mondes, et nous autres, derniers venus dans la science géographique,
nous n'avons plus rien à faire ?"