Géographie d'une société
par Jean-Marie Baldner et Didier Mendibil

Les photographies de l’exposition ont toutes été prises pendant le Second Empire et la première moitié de la IIIe République (entre les années 1850 et les années 1910) c’est-à-dire à l’époque où la Société de géographie a eu à la fois le plus d’influence et le plus d’adhérents.
   

Une société savante

La création de la première Société de géographie, à Paris en 1821, se situe au cœur d’un vaste mouvement d’intérêts de l’Europe pour les autres parties du monde. Intérêts culturels, scientifiques, économiques, politiques… la conjonction de ces différents intérêts a été rendue possible par l’entremise des sociétés de géographie qui, tout au long du XIXe siècle, se sont créées et organisées sur le modèle de leur illustre ancêtre parisienne.
ACTIVITÉDécouvrez la Société de géographie en consultant son site.
Rédigez une présentation synthétique ne dépassant pas vingt lignes. La Société de géographie existe-t-elle encore ?
Trouvez sur le site de la Société de géographie une image plus récente que celle ci-dessus.
 

Les sociétés de géographie dans le monde

Sur le modèle parisien, de nombreuses "filiales" se sont développées en toute indépendance en France et dans le monde. Beaucoup de sociétés de province continuent à s’associer à la société mère et l’Union Géographique Internationale réunit périodiquement les sociétés de géographie du monde entier.
ACTIVITÉL'objectif est de comprendre la place des sociétés savantes au XIXe siècle. Des sociétés de géographie se créent dans le monde entier. Mais dans quel monde ? La réponse se trouvera sur un planisphère politique en cartographiant les sièges des sociétés de géographie existant actuellement. sites à consulter  
Prenez un fond de carte. Reportez sur la carte les lieux et dates de création des sociétés de géographie en consultant le site de la Société de géographie. Les sociétés de géographie sont-elles les seules sociétés savantes reconnues d'utilité publique en France ? Consultez le site de l'enseignement supérieur.
 

Un groupe de pression et d’impulsion

La raison sociale de la Société de géographie était principalement intellectuelle. Il s’agissait de collecter, recouper, vérifier, archiver et diffuser les informations relatives à la connaissance géographique du monde. À ce titre, la société accueillait des explorateurs, des scientifiques, des militaires, des hommes d’affaires venus de tous les horizons pour leur permettre de décrire leurs voyages et d’exposer leurs découvertes ou leurs projets à un public intéressé et qualifié pour en juger. Elle suscitait et soutenait des missions en direction des parties du monde les moins connues et les plus inaccessibles dont elle tenait la carte minutieusement à jour.
La Société de géographie impulsait des expéditions scientifiques et contribuait à leur préparation en fournissant la documentation, en recherchant les appuis financiers privés et publics et en sollicitant les appuis d’influence nécessaires au sein même de l’État. Elle n’hésitait pas à prodiguer des conseils voire même quasiment une méthode de collecte des informations. Ainsi constituait-elle un groupe de pression influent lorsqu’elle soutenait certaines opérations de nature géopolitique telle que le percement des canaux transocéaniques de Suez et de Panama ou lorsqu’elle orientait l’effort collectif de recherche vers certains domaines de la connaissance (par exemple, l’amélioration de la technique photographique en extérieur) ou vers certaines régions du monde (l’Afrique et les zones polaires). Elle orientait aussi l’intérêt et les recherches vers certaines ressources rares (minerais).
ACTIVITÉL'objectif est d'approcher la vision du monde des sociétés de géographie.
A partir de la liste des lauréats des huit grands prix de la Société de géographie, cartographiez les parties du monde où ont eu lieu les explorations soutenues et primées par la Société de géographie et comparez cette carte à celle des sociétés de géographie dans le monde réalisée précédemment.
La Société de géographie a couronné les plus grands explorateurs et savants français et étrangers : René Caillié, Dumont d'Urville, Barth, Livingstone, Stanley, Savorgnan de Brazza, Nansen, Marchand, Lamy, Francis Garnier, Foureau, Pavie, Charcot, Amundsen, Peary, de Foucault, Albert Ier de Monaco, Paul-Emile Victor, Cousteau, Monod, Malaurie, Jean-Louis Etienne, Albert et Bernard Piquard, Francheschi etc., et pour ce qui est des géographes : Vidal de la Blache, de Martonne, Brunhes, Sorre, Baulig, Blanchard, Capot-Rey, Gaussen, Papy, Gourou, Gottmann, Guilcher, Dresch, Chabot, Flatrès, Journaux, George etc. et pour les non géographes : Lindbergh, Miquel, Lévi Strauss, Alain Peyrefitte etc., ainsi que les trois spationautes américains ayant atterri sur la lune.
Encore aujourd’hui, la Société de géographie poursuit sa mission d'utilité publique : recherche d'information et de documentation sur la Terre puis valorisation de ce patrimoine culturel, aide à la recherche scientifique par l’organisation de colloques spécialisés et par la publication de livres, soutien financier à l’esprit d’aventure géographique par ses prix annuels.
 
 

Des illustres sociétaires

La Société de géographie ne réunissait pas des géographes (puisque cette profession ne s'est vraiment différenciée qu'au XXe siècle) mais toutes sortes de scientifiques, des militaires, des diplomates, des hommes d'affaires et des hommes politiques, parfois de haut rang puisque plusieurs furent ministres, notamment sous le Second Empire. Tous se montraient intéressés, à des titres divers, par une connaissance précise de la géographie de la planète et par l'actualité de son exploration. À l'origine réservée à une élite culturelle et sociale, elle a sensiblement augmenté ses effectifs et ouvert ses activités culturelles à un public bourgeois plus large dans le dernier quart du XIXe siècle.
ACTIVITÉ Beaucoup de noms inscrits dans le tableau des administrateurs de la Société de géographie depuis sa création, figurent également dans les dictionnaires de noms propres. Ce sont principalement des noms de scientifiques, de militaires, de diplomates et d’hommes politiques (qui étaient généralement d’origine aristocratique sous le Second Empire).
Montrez que ces différentes catégories apparaissent en proportion variable si l’on y distingue les trois périodes suivantes : avant 1850 ; entre 1850 et 1918 ; après 1918. document à consulter
images à consulter
 
 
Au-delà de ses activités scientifiques, la Société de géographie mettait en contact des scientifiques avec des hommes d’action et de terrain et avec des artistes que l’exploration du monde fascinait. On connaît, par exemple, les relations étroites qui ont existé entre le photographe Paul Nadar, le dessinateur-cartographe Franz Schrader, l’illustrateur Gustave Doré, le géographe Élisée Reclus, l’écrivain Jules Verne, le peintre Claude Monet, tous gens d’images et de lumière… 
ACTIVITÉ On peut s’interroger sur les liens parfois étroits qui se sont établis, à cette époque, entre les récits des explorateurs et la littérature de voyage. En témoignent directement les voyages "romantiques" de Chateaubriand et surtout les "voyages extraordinaires" de Jules Verne.
Pourtant le point de vue littéraire est bien différent du point de vue du géographe. À travers ce groupement de texte, mettez en évidence ce qui les distingue.

Dans cette liste d’"écrivains-voyageurs", dont vous trouverez une courte biographie dans Wikipédia, lesquels peuvent avoir été en contact direct avec la Société de géographie entre 1850 et 1910 ?

Nicolas Bouvier
Louis Brauquier
Charles de Brosses
Blaise Cendrars
F.-R. de Chateaubriand
Bruce Chatwin
Christophe Cousin
Alexandra David-Néel
Alexandre Dumas-père
Isabelle Eberhardt
Gustave Flaubert
Théophile Gautier
Jean Giono

Arthur de Gobineau
Jack Kerouac
Jacques Lacarrière
Michel Le Bris
Laurie Lee
Patrick Leigh Fermor
Jack London
Pierre Loti
Rory Maclean
Maurice Maeterlinck
Ella Maillart
Henry de Monfreid
Charles Nodier

Jacques Nougier
Montesquieu
Gérard de Nerval
Jean Potocki
Alexandre Poussin
Arthur Rimbaud
Alberto Ruy-Sánchez
Victor Segalen
Mme de Staël
Stendhal
J.-M. G. Le Clézio

 
Recherchez les ouvres de trois d'entre eux en consultant diverses rubriques de Gallica : Gallica classique, Voyages en Afrique, Voyages en Italie, La France en Amérique, Voyages en France.
 

L’esprit d’aventure géographique contemporain

Colloques, conférences, publications, documentation : tels sont les moyens ordinaires et  traditionnels par lesquels s’entretient le travail scientifique. La Société de géographie continue à apporter une aide, parfois financière, aux entreprises qu’elle patronne.
ACTIVITÉ L'objectif est de comprendre les évolutions dans les représentations du monde.
En vous appuyant sur les patronages et les médailles d'or attribuées par la Société de géographie, cartographiez les parties du monde où ont eu lieu les expéditions soutenues par la Société de géographie au XXe siècle et comparez cette carte à celle des expéditions soutenues au XIXe siècle. Comparez-la également à la carte des sociétés de géographie dans le monde.
 
Dans un deuxième temps, plus libre, on peut :
découvrir le "Voyage en Orient " qui a fasciné le XIXe siècle en distinguant le périple romantique du voyage scientifique. Au siècle des grandes inventions, de la foi dans le progrès et des conquêtes coloniales, l'Orient est une mine d'explorations pour les Occidentaux. Des spécialistes de toutes disciplines procèdent à un vaste inventaire scientifique de l'Orient, tant hydrographique, climatique, botanique, zoologique, minéralogique qu'archéologique et sociologique… Ces aventuriers du savoir procèdent à tâtons, poursuivant leurs investigations au hasard des découvertes.
Ils sont en général accompagnés de photographes dont le seul souci est de rendre compte de l'état des recherches. Les artistes ont une approche différente : leur voyage en Orient initié par Gustave Flaubert et Maxime Du Camp, qui va d'Alexandrie jusqu'en Italie en passant par la Palestine, le Liban, la Syrie et Constantinople, est plus une quête de soi.
 
aller à la découverte de voyages plus anciens comme ceux d'Ulysse, de Marco Polo, ou d'al-Îdrisi.
 
jeter un coup d’œil aux nombreux sites que fait apparaître aujourd’hui la requête "expédition" sur Google ou sur d’autres moteurs de recherche. Mais il est vrai que ce n’est pas toujours de la géographie…

enfin, il est possible de compléter cet ensemble par la réflexion que mènent aujourd'hui quelques artistes sur les notions d'expédition, de voyage de découverte, d'exploration…, par exemple ceux présentés dans l'exposition " Expéditions " à la Galerie de Noisy-le-Sec (Dove Allouche, Simon Boudvin, Tacita Dean, Mathieu Kleyebe Abonnenc, Joachim Koester, Daniel Roth, Hans Schabus, Laurent Tixador & Abraham Poincheval) dont on trouve quelques reproductions sur la toile à partir d'un moteur de recherche.
Interrogeant les motivations des premiers explorateurs qui partirent à la découverte de territoires inconnus, l'exposition aborde la notion d'expédition sous l'angle de la quête et de l'introspection. Pour ceux qui en font l'expérience, la destination d'un tel voyage est une surface de projection croisant témoignages du passé, légendes et récits potentiels. Chargé de cette histoire, le lieu de l'exploration n'en demeure pas moins incertain. Celui-ci se présente comme une cible aux contours indéfinis, une zone d'ombre, un territoire à la frontière de l'abstraction. Censée résoudre cette énigme, l'expédition elle-même, retardée par ses détours et déroutes, peut s'éloigner de son objet initial, pour laisser progressivement place à une quête intérieure. Aussi organisée et scientifique que soit l'expédition, c'est du côté de cet égarement possible que se situe le point de départ de cette exposition.
 
Haut de page