Par Thierry Depaulis
Dès le XIIIe siècle s’était esquissée la tentation de tirer des jeux une ressource fiscale. Il est vrai que cette approche était restée étrangère au royaume de France et que le souci principal des communes italiennes et du roi de Castille était plus le maintien de l’ordre social et l’endiguement des joueurs qu’une véritable exigence fiscale, mais ailleurs, comme aux Pays-Bas, les ducs de Bourgogne octroient des concessions de jeu comme on accorde un bénéfice ecclésiastique. La vraie fiscalisation du jeu ne s’affirme pas avant la deuxième moitié du XVIe siècle. Elle frappe alors les cartes à jouer, que les souverains se savent incapables d’éradiquer tant ce commerce est devenu important, mais sur lesquelles on peut lever un impôt sans trop de scrupules. Les dés font parfois partie de l’aventure, du moins dans les textes, plus que dans la réalité.
S’il est des "académistes "et autres "brelandiers "qui tiennent des maisons de jeux plus ou moins tolérées, l’arsenal moderne des jeux fiscalisés – loteries, casinos – n’est pas encore au rendez-vous. Les rois Valois semblent avoir été assez hostiles à ces établissements, mais Henri IV leur permet de fonctionner et divers privilèges, comme celui que nous avons vu accorder pour le hoca sous Louis XIV, viennent constituer de véritables espaces professionnels du jeu. Il n’empêche : ces académies n’existent que par la volonté (ou la faiblesse) du roi. Aucun statut officiel n’est consenti et, partant, aucun impôt n’est pensable. Même au XVIIIe siècle, ces mécanismes ne sont en rien évidents. Côté loteries, leur appropriation progressive par l’État n’est pas à l’ordre du jour avant 1700.