L'activité de la rue
Atget ne photographie jamais les transformations haussmanniennes. Ceci à tel
point que l'on peut supposer une démarche consciente et volontaire. Dans
tous ses travaux, il évite soigneusement les traces de ces transformations
et préfère rendre compte de l’une des conséquences
du processus de l'haussmannisation de la ville : la distinction entre un nouveau
et un vieux Paris.
Le photographe s'intéresse donc à l'ancienne ville et aux activités
qui s'y déroulent. Ces activités nombreuses sont, pour Atget,
l'image d'un Paris qui persiste, et non pas une simple évocation nostalgique.
Bien plus, ce vieux Paris, son mode d'organisation sociale, ses rites et ses
usages présentent une véritable alternative à la modernité haussmannienne
et à ses mutations. Pour lui, les personnages qui animent ces rues façonnent
l'espace urbain et sont, littéralement, la ville. Car les activités
des petits métiers, des commerces de rue ou des étalages ne sont
pas contraintes par les nouvelles dispositions de l'urbanisme haussmannien.
Ainsi, sur les photographies d'Atget, la profusion des marchandises portées à même
le corps des marchands confère à la vieille ville une morphologie
dynamique et vivante. Les étalages qui débordent sur les trottoirs,
brouillant les limites entre l'espace privé et l'espace public, renvoient,
eux, à l'organisation spatiale propre à la ville pré-haussmannienne.