
 
    La vocation de l’Anglais Samuel Bourne naît à l’âge
      de dix-sept ans quand il découvre un portrait de son oncle sur daguerréotype.
      La vérité du rendu sur la plaque de verre, la minutie des
      détails, l’émerveillent littéralement. S’il
      commence une carrière d’employé de banque, tous ses
      loisirs sont consacrés à l’apprentissage de la photographie.
      Ses excursions en Écosse éveillent parallèlement son
      goût pour les paysages de montagne.
      En 1863, il abandonne finalement l’Angleterre et son métier
      pour s’installer en Inde. Il doit trouver le moyen de financer ses
      expéditions photographiques ; il s’associe donc avec Charles
      Shepherd, éditeur  à Simla, qui lui assure une diffusion
      de ses travaux. Dans cette ville, résidence d’été du
      gouvernement indien, le jeune homme noue de multiples relations professionnelles
      et amicales, qui favorisent la réalisation de ses projets.
      Un premier trek himalayen lui permet d’évaluer les difficultés
      liées à ce type d’entreprise. En juin 1864, il quitte
      Dharamsala pour une longue marche dans le Cachemire. Il lui faut huit mois
      pour explorer la région et réaliser des clichés d’une
      nature majestueuse. Quarante-deux porteurs sont nécessaires pour
      acheminer les verres, tentes et matériel photographique. Les sentiers à pic
      se révèlent parfois impraticables, les températures
      sont rudes, il faut souvent traverser les torrents sur des ponts de corde,
      pendant que le matériel flotte sur des peaux de mouton gonflées
      d’air.
      
   
		    
        
        
           
          Les clichés réalisés sur collodion humide sont
          d’une beauté remarquable, dans la grande tradition de
          la peinture anglaise de nature au XVIII
e siècle. Rien de surprenant à cela,
          puisque Samuel Bourne se voit d’abord comme un artiste dont les œuvres
          photographiques doivent refléter ses sentiments face à de
          telles immensités. Dans ses comptes rendus, il avoue
          choisir soigneusement son cadrage : avec « assez d’arbres
          et de feuillages pour prêter à la scène un air
          de sérénité » ou avec « quelques
          traces d’habitation et d’activité humaine, de manière à suggérer
          l’harmonieuse relation de l’homme avec la nature ».
 
       
	    
	   
      Samuel Bourne a ouvert la voie à plusieurs autres
        photographes britanniques de talent, qui feront le voyage jusqu’en
        Inde. John Burke et William Baker concluent une association et séjournent
        en 1868 à  Srinagar, la "ville du Soleil".
        Le pittoresque des lacs et des ponts de la capitale du Cachemire les
        ravit, ces paysages où Samuel Bourne aimait poser son
        objectif et qui lui rappelaient son Angleterre natale.  À leur
        tour, ils photographient les maisons de bois sur pilotis qui avaient
        tant charmé Bourne, « ces maisons qui se penchaient
        et obliquaient dans tous les sens comme si elles n’attendaient
        qu’une poussée pour s’écrouler ».
      
  
  
Très soucieux de la postérité de son œuvre, Bourne numérote et annote ses négatifs. Plus de deux mille clichés témoignent ainsi de ses explorations indiennes. Ils constituent aujourd'hui autant de précieux témoignages d'une époque révolue et de véritables œuvres d'art que tous les voyageurs en Inde se faisaient un devoir d'acheter comme souvenir de leur séjour.