Exercices d'iconographie
par Jean-Marie Baldner et Didier Mendibil

Portrait, image de soi

Il s’agit de réfléchir sur la possible réalisation actuelle d’un portrait "ethnologique", le décor, la pose, les objets qui donnent sens et unité à une photographie pour représenter par exemple un élève, un enseignant, un animateur de centre de loisirs, etc. en travaillant de préférence sur l'autoportrait.
ACTIVITÉ 1. Choisir un cadre significatif comme arrière-plan (mur de classe, mur extérieur ou entrée d’école, de centre de loisirs, etc.) avec quelques objets (affiche, tableau, plaque de nom, etc.) qui permettent de l’identifier immédiatement. Placer un ou deux personnages dans des poses significatives de leur activité dans le lieu dans une composition centrale. Ajouter en premier plan un objet significatif de l’activité du lieu.
2. Observer les lignes qui composent la photographie, les jeux de lumières, au besoin les modifier pour obtenir le résultat souhaité. Placer l’appareil photo sur pied à la distance souhaitée. Bien prendre le temps de visualiser et de vérifier la composition de la scène sur le viseur ou l’écran avant de déclencher.
3. Donner un titre à la photographie. Rédiger un texte pour expliquer la scène.
De façon à approfondir les différents paramètres de la composition et de la prise de vue, à réfléchir sur la façon dont un objet peut permettre d'aborder le portrait d'une personne, on peut s'inspirer d'un travail mené par Guillaume Pallat avec des classes de Créteil (Val-de-Marne) qui propose aux élèves de photographier au sténopé, c'est-à-dire avec une profondeur de champ qui va de zéro à l'infini et modifie ainsi les échelles respectives, l'objet qu'ils voudraient transmettre à leurs enfants ou à leurs petits enfants.
 

Mise en scène de soi et de l'autre

ACTIVITÉ 1. L'objectif de l'atelier, après avoir mené une analyse des différentes photographies est d'explorer nos modes de représentations actuelles de l'individu proche, autre ou étranger, notamment dans la publicité. Le travail de prise de vue pourra porter plus précisément sur :
- la notion de chef ;
- identité et altérité ;
- la représentation des sexes et plus particulièrement de la femme ;
- le portrait du sauvage, du primitif ;
- le portrait de l'Oriental, de l'Indien, de l'Africain ;
- la représentation folklorique.
La réflexion pourra être accompagnée de recherche d'artistes contemporain sur la représentation de soi et de l'autre, des sexes, etc. (le site dirigé par André Rouillé Paris-Art propose des articles sur presque tous ces photographes).

sites à consulter  Claude Closky, Mon père, Paris, M19, 2002 ;
 Barthélémy Toguo (voir les différents articles qui lui ont été consacré par paris-art.com ;
 Pierre Gonnord, Utòpicos ;
 Valérie Belin, notamment les séries "Femmes noires" et "Modèles"
 Seydou Keita voir notamment le volume qui lui est consacré dans la collection Photo Poche, Paris, Nathan/VUEF, 2001 ;
 Roger Ballen ;
 Rineke Dijkstra, notamment dans la comparaison entre les séries "Les portraits à la plage", "Les Soldats israéliens", "Les Matadors" et "Olivier"
 Malick Sidibé ;
 Jean-Christian Bourcart, notamment la série "Traffic" ;
 Véronique Ellena, notamment les séries "Ceux qui ont la foi", "Le plus bel âge"  ;
 Valérie Jouve ;
 Philippe Bazin, séries "Faces - Les vieillards" et "Adolescents" ;
 Denis Darzacq, notamment "les portraits" de "Bobigny-Centre ville" ;
 Pekka Turunen ;
 Marjaana Kella.
 
2. Par le choix d'une prise de vue dans un contexte signifiant, par photomontage ou collage, refaire les photographies dans un cadre approprié ou ajouter aux photographies précédentes un ou plusieurs éléments permettant d'identifier ou de créer un espace contextuel, dans le champ ou en le suggérant hors champ. Faire varier ce contexte en le transposant d'un portrait à un autre, en changeant de registre. Y a-t'il transfert de signification, nouveau sens apporté au portrait ? Le portrait donne-t-il un sens au contexte ? Pourquoi ?
L'atelier conduit évidemment soit à la prise de vue arrangée en studio, soit au photomontage réalisé par découpage dans les magazines et journaux et collage ou par le photomontage avec un logiciel de traitement de l'image ( hotoshop ou son équivalent dans le monde des logiciels libres The Gimp).
Cet atelier peut bien sûr être accompagné de références à l'histoire de la photographie : photomontages de Raoul Haussmann, Hannah Höch, Umbo, John Heartfield, Heinz Hajek-Halke, Heinz Loew, Alexandre Rodtchenko, El Lissitzky, etc. Le livre Photomontages. Photographie expérimentale de l'entre-deux-guerres paru dans la collection Photo Poche (Paris, Nathan/VUEF, 2001) propose de nombreux exemples. Mais un détour par l'étude de photographies publicitaires est indispensable :
- Étudier le décor, extérieur, intérieur, son organisation, sa composition, la position et la pose du sujet dans le décor.
- Essayer de déterminer si la photographie a été prise en studio, en extérieur avec un décor ajouté, s'il y a différentes prises de vue. Quelques signes comme les emplacements et les qualités des ombres et des lumières, les rapports d'échelle, les perspectives, le ou les points de fuite permettent souvent de formuler des hypothèses, rarement d'apporter une réponse sure.

sites à consulter On peut préférer la découverte de l'œuvre de quelques artistes contemporains qui utilisent ou non le traitement numérique de l'image, comme Denis Darzacq, Rineke Dijkstra, Véronique Ellena…, le travail de ces différents artistes est visible, entre autres, sur le site du Centre Photographique d'Île-de-France et plus particulièrement :
 Vincent Debanne, notamment les séries Station et Troops of Defense ;
 Valérie Jouve ;
 Cindy Sherman, notamment la série "Film still" ;
 Joan Fontcuberta, notamment la série Miracles & Co.
 
 
L'atelier se termine par une prise de vue (voir le protocole dans le paragraphe précédent), portrait d'une personne ou d'un objet qui identifie une personne dans un décor :
- décor lié au contexte de la prise de vue (école, lieu de travail ou de loisirs, rue…) : cadrer pour déterminer ce qui peut être signifiant pour situer le sujet ou pour mettre en valeur le portrait sans donner nécessairement la possibilité d'identifier le lieu ;
- décor reconstitué ou créé (salle de classe…) avec un arrangement d'objets signifiants, avec un fond photographique (paysage, lieu spécifique découpé dans un magazine, projection d'une photographie sur un mur…) ou peint ; la prise de vue du sujet peut être déconnectée de celle du fond s'il y a possibilité de montage, par collage ou avec un logiciel de traitement de l'image.

sites à consulter Dans un cadre plus spécifiquement scolaire, on pourra aussi se nourrir des projets menés par quelques artistes contemporains dans le cadre du projet "Des clics et des classes" en collaboration avec la Bnf, le Scérén-CNDP, les différents CRDP et les centres d'art :
  les Rencontres d'Arles : Eric Francesci, Laure Vasconi, Raphaël Dallaporta
 le Centre Photographique d'Île-de-France : Guillaume Herbaut, Guillaume Janot, Blanca Casas Brullet, Vincent Debanne ;
 le Musée Nicéphore Nièpce : Virginie Marnat, Jérôme Conscience
 le Centre de photographie de Lectoure : Jean-François Joly, Joachim Mogarra ;
 le Centre méditerranéen de la photographie : Antoine Giacomoni, Mireille Loup ;
 la Direction régionale des Affaires culturelles de Franche-Comté : Jean Daubas ;
 La Galerie, centre d'art contemporain de Noisy-le-Sec : Guillaume Lebrun ;
 les Cris et le Point Art de Montpellier : Aurélie Legall, Sylvia Hansmann, Ludovic Rouanet, Alexandra Frankewitz, Michel Gasarian, Claude Corbier ;
 la Maison européenne de la photographie : Marie-Hélène Le Ny ;
 Art3000 – Le Cube : Emmanuelle Fèvre ;
 le Domaine départemental de Chamarande ;
 le Théâtre de l'Agora - Scène nationale d'Evry et de l'Essonne : Hicham Benohoud.

 

Typologie, portrait générique, portrait robot

Il s'agit de réfléchir sur les typologies ainsi que sur les notions de portrait générique et de portrait robot.
ACTIVITÉ 1. Rassembler un corpus de portraits tirés de la presse ou de la publicité. À partir de ce corpus, déterminer un certain nombre de critères (caractères physiques, vêtement, bijoux…) qui permettent de constituer des types de portraits. Ramener, par photocopie ou par scan toutes les images aux mêmes dimensions. À la peinture, ou par un traitement numérique de l'image après scan, établir le même fond neutre. Réaliser un album papier ou numérique, une exposition, avec des titres et des textes courts présentant les classes retenues.
2. Tout en maintenant la neutralité du fond, en faire varier les couleurs, les valeurs du blanc au noir pour l'ensemble de la série et pour chaque classe. Que font apparaître ces choix ? Certaines couleurs ou valeurs sont-elles mieux ou moins bien "adaptées" au sujet ? Le fond dévoile-t-il ou masque-t-il le sujet ? Pourquoi ?
Dans la collection de photographies de presse ou publicitaires y a-t'il des couleurs et des valeurs de fond récurrentes ? Semblent-elles déterminées par les sujets ? Peut-on en établir une codification ?
Réaliser une trame ou un motif, ajouter de l'écrit, soit avec un logiciel de traitement de l'image après avoir scanné les photographies, soit avec un ajout de matière (peinture, sable, sel, résine, colle…). On peut s'inspirer des travaux de Hergo, de François-Marie Banier, ou de William Klein.  
Tout en gardant les choix de fond, remplacer les portraits d'individus par des "portraits" d'objets. La "neutralité" du fond conserve-t-elle le même sens ?L'atelier peut être accompagné de la découverte de l'œuvre de quelques artistes modernes et contemporains :
sites à consulter - Bernard Poinsot, Jean-Paul Dumas-Grille, Philippe Pache sur le site de l'exposition Portraits / Visages ;
- Marjaana Kella, visible, entre autres, sur les sites du Centre Photographique d'Île-de-France, du Taideomuseo Tennispalats d'Helsinki et de la galerie Poller ;
- Valérie Belin ;
- Thomas Ruff ;
- Pascal Lièvre, notamment la vidéo Abba Mao (Pascal Lièvre, Populaire, Paris, Arcadi - Lowave, 2001) et les tableaux remix pictural des photographies de Rineke Dijkstra.

Les références précédentes, autant les photographies des collections de la Société de géographie que les séries réalisées par les artistes contemporains, introduisent à la définition et à la mise en œuvre de protocoles de prise de vue pour la constitution de séries homogènes, par exemple les élèves d'une classe :
- création d'un fond neutre (toile, feuille de papier de grande dimension) blanc, noir ou coloré ;
- mise en place d'un éclairage après réalisation d'un croquis sur les parties (fond, sujet, parties du sujet…) à éclairer, à laisser dans l'ombre, et après réflexion sur la qualité des lumières (artificielle, naturelle, combinée) et des ombres (tamisées, contrastées…) ;
- repérage à la craie sur le sol de la position du sujet et si nécessaire des éclairages, de la distance du sujet à l'appareil, détermination de la hauteur de l'appareil, de la focale pour définir les zones de netteté, la profondeur de champ ;
- choix de la prise de vue : face, trois quart, profil, rapport entre les acteurs (voir les série "Les grands moments de la vie", "Les dimanches, "Supermarchés" de Véronique Ellena ;
- choix de la pose : position de la tête, ouverture des yeux face à l'objectif, position des épaules, des bras… (voir aussi les choix de Marjaana Kella ou de Malick Sidibé), organisation de la pose avec plusieurs personnages (voir à ce sujet l'œuvre de Florence Paradeis).
 
 
La prise de vue, réalisée de préférence avec un appareil fixé sur un pied est aussi l'occasion de s'intéresser au temps de la prise de vue, plusieurs des portraits présentés dans l'exposition ont nécessité une pose longue. Deux méthodes sont possibles :
- demander au sujet de tenir la pose quelques secondes et ne déclencher qu'à l'issue de ce temps ou, avec un appareil numérique, multiplier les prises de vue d'une même pose pendant un laps de temps prédéfini ;
- réaliser la prise de vue au sténopé en demandant au sujet de rester immobile le temps de la pose (voir par exemple les portraits réalisés au Mali par l'association Oscura : de nombreux sites donnent les indications nécessaires à la construction d'un sténopé en recherchant "sténopé" ou "pinhole" avec un moteur de recherche.

3. Enfin divers ateliers sont possibles autour de l'individualité, du portrait générique et du portrait composite. Ils requièrent tous un minimum de précaution et, dans la plupart des cas, il est préférable que chacun intervienne sur son autoportrait ou que l'atelier soit basé sur des portraits découpés dans les magazines (publicité, mode…) :
a) Réaliser un autoportrait ou partir d'un portrait découpé. Sur écran, à l'aide d'un logiciel de traitement de l'image, ou sur papier avec de la peinture, des feutres, des crayons, intervenir sur le portrait pour en modifier les caractéristiques d'individualité par effacement, retranchement,  ajout… Quelques pistes peuvent être explorées à partir d'une analyse des œuvres d'Arnulf Rainer, Dieter Appelt, Youssouf Wachill, Caroline Feyt, Aziz et Cucher.
b) Dans plusieurs numéros d'un même magazine, dans une campagne publicitaire, dans un journal… collecter plusieurs portraits. Les scanner. Avec un logiciel de traitement de l'image, après les avoir si nécessaire ramenés à la même taille en se basant par exemple sur l'écartement des yeux, réaliser une image superposant le calque de chaque portrait. Régler de façon identique la transparence de chacun des calques. Le réglage de l'opacité des calques dépend du nombre de calques et est obtenu par tâtonnement. Fusionner les calques. Densifier l'image obtenue.
La même réflexion sur le portrait générique et le stéréotype peut être mené avec un logiciel de "morphing". Dans un groupe soudé avec des individualités solides, la recherche d'une "identité" morphologique du groupe à partir du visage, mais aussi à partir de la silhouette, y compris à partir de prises de vue de dos, peut être menée, après repérage précis (repères sur le sol et sur le fond) pour obtenir des poses identiques, à partir d'une prise de vue des individus composant le groupe.
c) Dans une collection de portraits (magazines, campagnes de publicité…), transformer chaque portrait, à la peinture, au feutre… ou à l'aide d'un logiciel de traitement de l'image, selon des codes esthétiques observés dans des tableaux du Moyen Âge, de la Renaissance…, dans des portraits de différentes cultures.
 

Le portrait et son commentaire

Il s'agit de réfléchir sur les typologies ainsi que sur les notions de portrait générique et de portrait robot.
ACTIVITÉ 1. À partir d'une photographie de l'exposition, par exemple une des photographies réalisées au Jardin d'acclimatation, réaliser un reportage (écrit, sonore, audiovisuel) illustré par cette photographie.
2. Sélectionner de cinq à dix photographies de l'exposition. À partir de celles-ci, imaginer une rencontre, dans laquelle plusieurs portraits seront dressés. Le texte se situera au choix dans l'un des registres suivants :
- un récit d'exploration,
- un scénario de film,
- le texte d'une pièce de théâtre,
- les textes d'une mise en exposition des photographies,
- un site web sur une exploration.
Variante : Découper quatre à cinq photographies dans un magazine (reportage, publicité…) et agencer les images de façon à constituer la base d'un texte selon les modalités précédentes.
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