Un systme social rationnel
Au lieu [des] institutions et
pratiques insensées, compliquées, et contradictoires, qui émanent toutes dun
petit nombre de fausses idées fondamentales sur lhumanité, il faut dautres
arrangements et dispositions, à savoir :
1. Que les connaissances et
lexpérience de lespèce humaine soient rassemblées et concentrées, afin de
donner une direction avantageuse à toutes les forces et puissances, manuelles et
scientifiques, qui ont été accumulées dans les siècles passés ;
2. Que ces pouvoirs soient partout concentrés pour produire la plus grande quantité de
la richesse la plus précieuse, avec le moins de travail manuel malsain ou désagréable,
avec le moins de perte de temps et de capital possible ;
3. Que les pouvoirs artificiels et scientiques soient employés, de la manière la plus
étendue, dans les arrangements domestiques, aussi bien que dans tous les autres
départements sociaux ;
4. Que tout ce qui est inférieur, dans toutes les dispositions sociales, soit remplacé
par ce qui est supérieur. Ainsi, il ny aura rien dinf érieur dans la
culture du sol , dans le logement, dans la préparation des aliments et des
vêtements ni dans léducation et formation du caractère des hommes et des
femmes ;
5. Que les richesses produites soient conservées et distribuées de la manière la plus
avantageuse pour tous ;
6. Que le gouvernement local et général soit conforme à ce nouvel état supérieur
dexistence, dans lequel il y aura peu de choses à faire pour préserver
lunité des différentes parties de la société, et assurer le bien-être
progressif de tous ;
7. Que léducation et la condition soient aussi parfaits que le permettra la somme
des connaissances et moyens, et que la seule division soit celle de lâge ; aux
enfants, le service ; aux adultes, la production, conservation et distribution des
richesses ; aux vieillards, le gouvernement et la jouissance des loisirs ;
8. Que tous soient aussi toujours employés dans des occupations actives et attrayantes,
à avancer le bonheur et lamélioration de la société, sans avoir égard
exclusivement à soi. Le bonheur de chacun sera ainsi constamment assuré sans lutte, et
mille fois augmenté ;
9. Cette manière délever et demployer, et de gouverner la société,
daprès des principes de justice et de bienveillance, rendra inutiles les religions
et les lois anti-naturelles, les récompenses et les châtiments ;
10. Que les deux sexes soient égaux en éducation et en droits, les femmes étant
élevées pour être compagnes parfaites des hommes. Que les unions se fassent
conformément aux affections, et suivant des dispositions qui seraient nécessairement
établies par des êtres devenus rationnels, placés dans des circonstances formées et
combinées duns manière rationelle, et quil est impossible de fixer ni
prévoir avant lexpérience . Que les enfants soient tous élevés comme
enfants de la même famille la grande famille humaine unie dintérêt
et daffection, et à labri de toute infliance répulsive ;
11. Le seul langage parlé ou exprimé par la parole, le regard ou laction, sera
celui de la vérité, sans mystère, mélangé derreur, ni crainte de
lhomme ;
12. La paix deviendra universelle par suite des avantages incalculables de lunion
sur la division ;
13. Quil ne soit perçu aucun impôt, tout le monde étant amplement pourvu de la
surabondance du fonds commun.
En vertu de ces changements, la
société ne sera plus un composé discordant des classes hautes, moyennes et basses, mais
elle deviendra une seule classe éminemment supérieure, partagée en sections suivant
lâge, et assurant à chacun la plus grande somme de bien-être que le comportera
son organisation. Elle formera un seul système scientifique lié dans toutes ses
branches, pour la production, la conservation, la distribution et la consommation des
richesses, de la manière la plus avantageuse pour chacun et pour tous ; pour bien
former le caractère physique, intellectuel, moral et pratique de tous, et pour gouverner
le tout, sans violence ni fraude, de manière à faire un progrès continuel dans le
perfectionnement de toutes les dispositions sociales, dans toute espèce de connaissance,
et dans la jouissance dune félicité croissante et inaltérable.
Robert Owen, Le
livre du nouveau monde moral contenant le système social rationnel basé sur les lois de
la nature humaine,
Paris, 1847 (Abrégé et trad. de langlais par T. W. Thornton), pp. 40-42.) |